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Crédit photo: Super tout nu / Rémi Benoit
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Un supermarché 100% vrac, c’est possible ?

7 octobre 2024 | Par Sophie Bordes

Super Tout nu, une nouvelle épicerie de grande capacité de la banlieue de Toulouse en France fait le pari d’offrir une offre fondée exclusivement sur le vrac. Premier supermarché de l’entreprise derrière le concept de Drive tout nu, un service qui permet de récupérer ses courses préconditionnées dans des emballages réutilisables, le Super tout nu offre une large sélection alimentaire « locale, bio et gourmande ».

La particularité de sa mise en marché se situe dans la présentation des produits. Même si certains aliments sont disponibles dans la forme traditionnelle du vrac où les clients choisissent eux-mêmes leurs quantités, la plupart des produits sont offerts dans des contenants en verre consignés.

Une logistique rodée

« Chez nous, on prône la simplicité d’achat d’usage sans emballage, » souligne Marie Alsina, responsable Marketing et Communication de Super tout nu. Voilà pourquoi, du salé au sucré, du fromage aux carrés de chocolat, tout est majoritairement « aliquoté » (ou distribué) dans des bocaux. Cette manutention prend toutefois du temps et de la main-d’œuvre.

Le magasin de 400 m2 s’est doté d’un HUB, une zone de stockage et de conditionnement, avec tunnel de lavage et aliquoteurs (machines pour doser et remplir les bocaux). Concrètement, c’est dans cet espace que les pots sont lavés, stérilisés, séchés tête en bas puis vérifiés à la lumière. S’il reste un résidu, ils sont mis de côté, sinon ils passent au remplissage (ou aliquotage).

La clientèle de Super tout nu a la possibilité d’acheter les bocaux ou de passer à travers un système de consigne inversée incitative. « On encourage les gens à nous rapporter leur pot contre 10 sous en bon d’achat » précise-t-elle.

Qu’en est-il au Québec ?

Les épiceries de vrac poussent un peu partout à Montréal et dans les grandes villes, avec plus ou moins de succès depuis la pandémie. Par contre, aucune pour l’instant ne peut prétendre au statut de supermarché comme le fait Super tout nu.

Opérant à plus petite échelle, elles profitent d’une clientèle de quartier souvent fidèle, qui a une conscience environnementale et le souci de manger santé. Comme le fait remarquer Blandine Mille, copropriétaire de LOCO Plateau : « On se connaît tous, on est tous des collègues et non des compétiteurs. Nos compétiteurs, ce sont les grosses bannières. »

La vente en vrac rencontre parfois quelques obstacles. Super tout nu a beau se targuer de proposer 60 % de produits locaux, certains produits ne se font ni dans le vrac, ni dans le bio, ni dans le local, ni sans emballage.

Pour faire face au problème, les épiceries de vrac québécoises ont généralement une offre avec moins de diversité qu’une grande surface, mais beaucoup plus de qualité et des produits réellement nutritifs. C’est le parti pris par LOCO qui croit à la qualité versus la quantité. « Si les gens faisaient le calcul de tous les aliments qu’ils jettent, ils réaliseraient les économies qu’il y a à faire en achetant en vrac la quantité nécessaire et pas davantage », affirme Blandine Mille

Du côté de Super tout nu, on a plutôt opté pour faire des compromis. Des fruits comme la banane, l’ananas, la mangue ou l’avocat ne se cultivent pas en France (ni au Québec d’ailleurs). Difficile dans ce cas pour Super tout nu de respecter son engagement de se fournir chez des producteurs ou des transformateurs situés dans un rayon de 100 kilomètres. Le supermarché s’autorise ainsi quelques exceptions en faisant venir des produits d’Italie ou d’Espagne. Marie Alsina explique : « On n’a pas d’avocat pendant les trois quarts de l’année, et les mois où on en vend, il est bio et espagnol ». Le problème se pose également pour les épiceries d’ici, d’autant que les distances géographiques ne permettent pas toujours de s’approvisionner chez des producteurs situés à moins de 100 kilomètres, avocats ou pas.

Le beurre représente un autre défi. Seul du beurre de très grande qualité est vendu en bocal, son prix est donc élevé. Pour offrir un choix moins cher à la clientèle, le Super tout nu propose un beurre emballé plus accessible. « On se dit que si les gens achètent du beurre emballé, ce n’est rien par rapport à tous les produits qu’ils achètent chez nous avec zéro déchet », justifie Marie Alsina.

Malgré l’économie des coûts du marketing et de l’emballage qui représentent environ 40 % du prix affiché, les consommateurs ne paient pas moins cher dans les épiceries de vrac. Cela se justifie par la qualité supérieure de tous les produits, selon Marie Alsina. Elle est d’avis qu’il y a vraiment une éducation à faire auprès des gens qui n’achètent qu’en fonction du prix. « Ce n’est pas vrai qu’on peut bien manger avec des produits de grande surface » revendique-t-elle.

Même envie chez LOCO de conscientiser sa clientèle et de révolutionner, à son niveau et avec ses moyens, le marché de la consommation alimentaire du Québec, en démontrant les avantages du vrac, et les économies que ça représente sur le budget du foyer.

Mots-clés: boutique d’aliments en vrac
Europe
Québec