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Crédit photo: Thanh Pham
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Transformer ses pertes en produits

3 décembre 2024 | Par Sophie Bordes

Née en 2017, l’OBNL la Transformerie transforme les aliments destinés aux poubelles des épiciers en tartinades, marmelades et sauces qu’elle distribue à travers son projet Rescapés. L’entreprise travaille principalement avec les épiceries et fruiteries du quartier Rosemont-Petite-Patrie à Montréal où elle collecte sa matière première et revend ses produits.

« J’ai toujours fait des projets qui dans ma tête à moi devaient avoir du sens, qui étaient liés à mes valeurs, tels que l’alimentation locale, la cuisine patrimoniale du Québec, la réduction des déchets, la valorisation des petits producteurs. C’est ce qui a teinté mon parcours, » explique Guillaume Cantin, co-initiateur et directeur général de la Transformerie.

De l’engagement personnel au travail collaboratif

Avant de se lancer dans cette aventure, l’ancien chef du restaurant Les 400 coups avait une très mauvaise image des aliments jetés par les épiceries. Jusqu’au moment où, en acceptant le défi de réaliser un souper gastronomique avec des déchets, il découvre la réalité du terrain.

« Avec une journaliste du Devoir et deux photographes professionnels, on s’est littéralement jetés dans les bennes à déchets des épiceries. Et après seulement deux épiceries, on avait à manger pour 100 personnes ! On s’attendait à la quantité de la nourriture, mais ce qui nous a marqués profondément, c’est la qualité de la nourriture, » confie Guillaume Cantin.

Fort de cette expérience, il s’est mis à échanger avec des acteurs du détail alimentaire pour mieux comprendre leur réalité et leurs enjeux sur le gaspillage. « On a parlé avec les employés, les gérants, les commis, les propriétaires, juste pour ouvrir la discussion. On s’est mis en posture d’écoute et en mode solution. »

Sauver les déchets de la fin de semaine

Guillaume comprend que les épiceries donnent déjà une partie de leurs invendus, mais que le processus peut rapidement devenir très complexe pour elles.

« On a constaté qu’il n’y avait pas de service de ramassage la fin de semaine. Alors, on a décidé de passer le dimanche récupérer la nourriture qui autrement aurait été jetée. Le plus beau dans tout ça, c’est qu’on ne vient pas enlever de la nourriture à des organismes qui se déplacent en semaine, on vient au contraire leur en donner plus. » se réjouit l’entrepreneur.

En effet, 67 % des aliments récupérés par l’OBNL sont redistribués gratuitement à des organismes en dépannage alimentaire. Et comme tout ne peut pas être transformé, on y retrouve du pain, de la viande, du poisson et d’autres aliments parfaitement consommables. Sinon, 26 % des aliments collectés sont transformés en produits Rescapés, en majorité revendus aux épiceries d’où proviennent les déchets. Et seulement 7 % du total de la collecte finit au compost.

« On crée du lien et du tissu communautaire, car la nourriture transformée, ou pas, est redistribuée dans le quartier. » souligne fièrement le chef. « Pour les commerçants, on réduit leurs coûts de traitement des déchets et au lieu qu’ils voient ça comme une épine dans le pied, on inverse le narratif pour en faire une situation positive dont ils sont fiers. » ajoute-t-il. Un peu comme si cette épine dans le pied des détaillants devenait l’épine dorsale de la mission de la Transformerie. Un constat plutôt réjouissant en fin de compte.

Mots-clés: Développement durable
Montréal (06)